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Président de l’ONG Wafi

Silué Boloba (Promoteur de patrimoine culturel) :

« La femme Sénoufo est sage lorsqu’elle atteint la ménopause »

Investi dans la promotion des patrimoines culturels, le président de l’Ong Wafi, Silué Boloba est dans l’organisation des prochains initiés au Poro du village de Dagba situé dans la sous-préfecture de Sirasso (Korhogo). Formateur au Poro, il aborde dans cet entretien les vertus de l’initiation des jeunes à la tradition Sénoufo.   

A quoi répond l’implication de votre Ong dans la sortie et l’entrée des jeunes au Poro ?

En ma qualité de président de l’Ong Wafi et natif du village de Dagba, je suis impliqué dans l’organisation de cette cérémonie traditionnelle. Les anciens postulants au Poro de 2014 ressortent après 7 ans de formation dans le bois sacré.  Une autre génération va faire son entrée. Nous allons procéder à la sortie de cette génération. Elle sort le lundi (Ndlr : hier) et la nouvelle génération entre le vendredi prochain. Les initiés ne vont pas intervenir, mais l’Ong va mettre l’accent sur les alliances interethniques. Bientôt, nous aurons des conférences, des débats télévisés pour permettre aux uns et aux autres de savoir que les alliances existent. Les alliances doivent nous conduire à éviter les casses. Le principe des alliances conseille de ne pas faire du mal à son allié. Il faut éviter des malédictions qui vont nous suivre. Les alliances sont très importantes, surtout en cette période d’élection à venir. Les jeunes doivent avoir l’esprit de discernement et de sagesse.

Quel est le contenu de cette formation des jeunes initiés ?

Pendant la formation, on apprend aux jeunes initiés le savoir-vivre, le savoir-être.  La formation leur permet d’affronter la vie, de supporter des difficultés, d’être fraternels. Accepter de subir des sanctions ensemble pour éviter que tout le monde soit fautif.  Cela permet aux jeunes d’être solidaires. Et d’affronter la vie ensemble. C’est ce qui fait la force de l’initié en pays Sénoufo. Les jeunes Sénoufo qui ont fait le bois sacré emmagasinent beaucoup et parlent très peu. C’est pourquoi vous avez le symbole du Sénoufo qui est le calao.

Y a-t-il des conditions pour franchir le bois sacré ?

Le proposé doit être un homme âgé d’au moins 14 ans.  C’est la seule condition pour entrer dans le bois sacré. Le reste est secret. Il s’agit de former les jeunes pour les intégrer dans la vie sociale. Ils doivent être capables d’appliquer leur formation autour d’eux.

Que renferme le symbole du calao dans la formation ?

C’est l’oiseau mythique qui renferme beaucoup de significations. Il y a par exemple le long bec, le gros ventre. Et un dos large. Cette partie veut dire que cet oiseau supporte beaucoup de coups dans la vie. Cela peut être des trahisons, des jalousies etc. Le ventre permet d’emmagasiner. Le long bec indique que cet oiseau ne parle pas trop.

A quand remontent les alliances interethniques ?

Les alliances traditionnelles existent depuis très longtemps. Etant donné que les alliances sous-tendent le processus de paix, aucune alliance n’est interdite. Aujourd’hui, vous avez un peuple nigérian, les Anango qui sont alliés au Senoufo. C’est très beau. Tout ce qui va dans le sens de la paix est à féliciter.

Le Sénoufo est-il phallocratique, qu’en est-il ?

Non. Le Sénoufo aime la femme (Rires). Dans mon bois sacré, les femmes ne font pas le Poro. Par contre, dans d’autres bois sacrés, elles le font à condition d’atteindre la ménopause. La femme Sénoufo est sage lorsqu’elle atteint la ménopause. Les femmes sont bavardes. On ne doit pas trop leur confier des secrets.

Quelle est donc la place de la femme dans la société Sénoufo ?

Les femmes ont leur foret sacrée à part. Leur formation est possible qu’après l’excision. Elles sont formées par des vieilles femmes sur un certain nombre de choses. Etant donné que l’excision est interdite et que nous la condamnons, la foret sacrée des femmes a disparu. Pour entrer dans le bois sacré des hommes, il faut que la femme atteigne la ménopause. Les femmes font des réunions entre elles pour mieux organiser leurs foyers.

Qu’avez-vous à dire pour apaiser les esprits en cette période électorale marquée par des troubles ?

Je demande aux hommes politiques d’être peu bavards quel que soit leur bord. J’invite la jeunesse à préserver la paix. Ne cassons pas le peu qu’on a. Evitons d’aggraver la situation. Dans le cadre de la cohésion sociale, nous avons invité le roi de Krindjabo et sa notabilité pour s’imprégner des réalités du Poro. Nous souhaitons un jumelage entre nos deux peuples. Les Ivoiriens doivent se sentir à l’aise partout. J’ai beaucoup aimé le royaume du Krindjabo tout comme celui du royaume de l’indenié ou j’ai exercé. J’ai pratiqué le komian (Ndlr : pratique mystique) à Abengourou. J’ai même vu un jeune Sénoufo qui maitrise bien le komian que les Agni. Nous n’avons pas suffisamment de moyens pour inviter tous les rois à la cérémonie.

Entretien réalisé par

Aimé Dinguy’s N.

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